Trois études pour une crucifixion
Trois études pour une crucifixion (Three Studies for a Crucifixion), 1962
Huile sur toile, triptyque
198,1 x 144,8 cm chacun
Solomon R. Guggenheim Museum, New York, 64.1700
© The Estate of Francis Bacon. All rights reserved. DACS/VEGAP. Bilbao, 2015
“Ce que j'aime le plus faire, ce sont les triptyques, et je pense que cela est peut-être lié au désir de tourner un film que j'ai parfois caressé. La juxtaposition d'images divisées sur trois toiles différentes m'intéresse. À condition de considérer que mon travail est de qualité, j'ai en général l'idée que ce sont peut-être les triptyques qui ont le plus d'importance”. Francis Bacon, 1979[1]
Francis Bacon (Dublin, 1909─Madrid, 1992) commence à envisager une carrière de peintre après avoir vu, en 1927, une exposition consacrée à Pablo Picasso (Malaga, 1881─Mougins, 1973) à la galerie parisienne Paul Rosenberg. Les figures anthropomorphes de Picasso l'impressionnent alors de telle sorte qu'il décide de se lancer dans la peinture en autodidacte. En 1929, il revient à Londres, où il apprend sur le tas quelques techniques de dessin et de peinture. Parallèlement, il commence à travailler comme décorateur d'intérieur et designer de meubles, tapis et carreaux de faïence. Bacon peint régulièrement tout en détruisant les toiles qui pour lui n'ont pas le niveau suffisant. En 1933, un de ses tableaux est reproduit dans l'ouvrage d’Herbert Read Art Now: An Introduction to the Theory of Modern Painting and Sculpture. Il s'agit de Crucifixion (1933), qui apparaît à une place d'honneur en regard avec Baigneur (1929), de Picasso. Mais si Bacon reçoit cette marque de considération dès le début de sa carrière et très jeune encore, par la suite il n'a pas le même succès. Entre 1936 et 1943, il cesse pratiquement de peindre. Alors que la Seconde Guerre Mondiale commence, il est réformé et affecté à la défense civile en raison de son asthme chronique [2]. Ce n'est qu'à partir de 1944 qu'il reprend la peinture de façon continue.
En cette année 1944, l'une des plus dévastatrices de la Seconde Guerre Mondiale, il peint Trois études de figures au pied d'une crucifixion (1944), un triptyque effrayant dans lequel des créatures anthropomorphes se tordent d'angoisse. Cette œuvre porte en germe les triptyques grand format que Bacon entreprend plus tard, dont Trois études pour une crucifixion (1962, qui fut le premier [3]. Là, Bacon traite le motif religieux comme une métaphore de la souffrance humaine en représentant la figure crucifiée comme un cadavre dépecé [4]. En contraste avec les triptyques religieux traditionnels, les trois panneaux sont complètement indépendants : leurs scènes ont à voir les unes avec les autres mais ne construisent pas de récit, ne constituent pas un tout unifié. Cependant, les trois panneaux sont reliés par leurs fonds, quasiment monochromes, dans l'orange-rouge intense, simples et uniformes, qui couvrent l'espace cylindrique qui enchâsse les figures. Par contre les figures, disposées au premier plan, sont traitées avec une palette très colorée ; leurs formes complexes se détachent et sont projetées grâce à l'uniformité de l'espace qui les entoure.
Sur le panneau de droite de Trois études pour une crucifixion (1962), Bacon montre une figure dont la composition rappelle les scènes traditionnelles du Christ sur la croix. Sur le panneau de gauche, deux hombres semblent se trouver dans une boucherie où sont étalés les morceaux de viande. Mais c'est sur le panneau central que se trouve l'objet le plus important : le lit, où gît un corps convulsionné de douleur. Pour l'artiste, le lit est le lieu où tout commence et tout finit.
Preguntas
Observez attentivement la peinture de Bacon pendant quelques minutes. Que se passe-t-il dans cette scène ?
Contemplez d’abord le panneau de gauche : Décrivez les personnages qui apparaissent sur le tableau. De qui peut-il s’agir ? Comment décririez-vous leur visage ? Et leur habillement ? Selon vous, où se trouvent-ils ? Comment est cet endroit ? À votre avis, que font-ils là ? Quelles émotions ou sentiments suscite en vous cette œuvre ? Pourquoi ?
Continuez en passant au panneau central : À votre avis, qu’est-ce qui arrive à cette figure ? Pourquoi se trouve-t-elle sur un lit ? Quel état d’esprit, sentiment ou sensation produit chez vous cette partie de la peinture ?
Et enfin, regardez le panneau de droite : Que voyez-vous ? Décrivez en détail ce que vous voyez. Qu’est-ce que cela vous rappelle ? Avez-vous déjà vu quelque chose de semblable ? Où ? Quelles sensations provoque cette partie ? Pourquoi ?
Bien que les trois panneaux soient indépendants, leurs scènes sont reliées entre elles. De quelle façon à votre avis l’artiste est-il parvenu à les relier ? Souvenez-vous de la sensation produite par chacune des parties : en quoi se ressemblent-elles entre elles í? En quoi se distinguent-elles ?
Le triptyque est intitulé Trois études pour une crucifixion. Pourquoi selon vous porte-t-il ce titre ? Vous semble-t-il approprié ? Pourquoi ? Si vous pouviez le changer, comment intituleriez-vois le tableau ?